Bords de mer en Vendée

Après le Japon, l’Italie et le Portugal, je repars déjà, cette fois en train, direction Les Sables d’Olonne. J’arrive à 15h24 sous une pluie battante et ma tante vient me chercher en ciré. A la gare des Sables, ça sent déjà la mer, malgré le rideau gris qui enserre le ciel. J’ai hâte qu’il soit tiré, qu’à nouveau le ciel bleu perce les nuages et qu’on puisse profiter de la plage. Je sais pourtant que la baignade ne sera pas de mise (trop froide, trop agitée pour la petite Réunionnaise que je suis).

Dès le lendemain, mes prières sont exaucées. L’eau de pluie s’en est allée et les températures d’un été venteux de côte atlantique se relèvent. C’est parti pour une excursion à La Chaume, le port de commerce relié au port des Sables d’Olonne par le chenal du port. L’endroit est plus tranquille que la Marina Olonna, où stationnent tous les voiliers. Après un petit crochet par ce dernier, nous voilà donc sur le transbordeur qui relie différents points des ports. La vue sur le chenal est magnifique, encadrée par deux jetées (dont la jetée Saint-Nicolas avec le phare). Et La Chaume et ses couleurs : une vision reposante depuis les bords du chenal. Il faut descendre un petit escalier en pierre et attendre presque les pieds dans l’eau que le passeur vienne nous chercher.

De la mytiliculture

Une fois de l’autre côté, c’est déjà l’heure du repas. Cela veut bien sûr dire soupe de poisson avec sa rouille (genre de mayonnaise épicée) et… moules à la marinière ! Mes premières de l’été.

Les restaurants se succèdent en face de l’entrée du port de commerce. Ils servent tous des moules en terrasse, avec quelques assiettes de fruits de mer et de poisson bien sûr. Les moules, si vous ne le saviez pas, sont l’une des spécialités de Vendée du sud. On les y cultive depuis 1844 sur des pieux de bois disposés en ligne dans l’estran (la partie du littoral située entre les limites extrêmes des plus hautes et des plus basses marées et qui possède un biotope spécifique) appelés des « bouchots ». C’est à cause de ce mode de culture qu’on appelle ces moules les moules de bouchot. L’autre mode de mytiliculture se fait en pleine mer et les moules sont alors appelées « moules de filière » (un système de bouées qui flottent). Originellement en Vendée, les bouchots ont été installés dans la Baie de l’Aiguillon. C’est encore le berceau de l’élevage de moules.

On mange donc des moules presque dans tous les restaurants de bord de mer vendéens, elles sont bien sûr présentées dans leur cocotte avec des frites (pas toujours maison malheureusement) et la meilleure recette reste celle à la marinière (avec une sauce au vin blanc et à l’échalote). On trouve malgré tout des sauces plus originales, à la sauce tomate, à la crème et au citron… mais aussi gratinées.

La mer qu’on voit danser…

Pour conclure un bon repas, rien de tel qu’une balade au bord de la mer, le long des rochers qui surplombent l’Atlantique. D’abord la plage, puis le port, puis le chemin au-dessus des vagues. Ce que j’aime particulièrement, c’est déambuler entre les bateaux dont les cordes claquent contre les mâts. Ma tante dit que c’est le son qu’elle préfère. Elle qui a fait beaucoup de voile et est sortie de nombreuses fois sur des voiliers en compagnie de marins connus, est totalement dans son élément sur le port.

A moi, cela me rappelle les histoires de voile qu’on m’a racontées lorsque j’ai commencé à travailler pour l’équipe d’un marin chevronné, Yannick Bestaven, qui allait faire la Route du Rhum 2014 en solitaire (transatlantique au départ de Saint-Malo jusqu’à Pointe-à-Pitre) : j’ai eu la chance de rencontrer alors une ancienne navigatrice, du nom d’Anne Combier. Un personnage haut en couleur qui parle super vite et passionnément de son milieu de marins. C’est elle qui m’a fait aimer cet univers, même si parfois, je ne comprenais pas la moitié de ce qu’elle disait à cause du jargon des voileux. C’est cet épisode qui m’a ouvert la porte du monde de la voile. Evidemment, je n’y connais toujours absolument rien en soi, j’admire simplement les bateaux – je distingue seulement quelques modèles de voiliers – mais j’ai commencé à suivre les courses, et c’est déjà palpitant ! L’année prochaine, j’aimerais bien faire le départ du Vendée Globe (tour du monde de voile en solitaire) à partir des Sables d’Olonne, justement.

Au-delà du port, c’est juste la mer qui danse qu’on admire depuis la côte escarpée, sculptée par le vent. Sur cette partie, il reste même des anciens bunkers de la Première Guerre Mondiale, désormais à moitié ensevelis. Cela n’enlève rien au charme ensoleillé et sauvage de la falaise.

Dernières nouvelles d’une abbaye

Davantage dans les terres, voici un dernier épisode de mon séjour en Vendée que j’ai envie de raconter. Cette fois, on s’éloigne du roulis des vagues et du miroitement de la mer, mais pas pour si longtemps. Ma tante m’emmène voir une exposition d’été dans une ancienne abbaye, presque en ruines (je me demande comment elle tient encore debout), qui accueille des spectacles et des expos d’art contemporain tout au long de l’année. C’est l’Abbaye Saint-Jean d’Orbestier. Cette fois, c’est un sculpteur du nom de Philippe Cognée qui expose. Son thème : la tête. A l’entrée de l’abbaye, de nombreuses têtes en terres cuites occupent le sol. Elles sont disposées de façon géométrique, et regardent vers l’entrée. Contre la hauteur de pierre de la nef, les sculptures opposent leur attache primitive à la terre, dans la lumière du vitrail central.

Derrière l’abbaye, encore des sculpture, permanentes cette fois, regardent la mer mais ne la touche pas. Il s’agit de trois figures longilignes taillées dans des troncs massifs par l’artiste Christian Lapie. On devine des visages gravés tournés vers l’océan : ils sont comme trois phares d’espérance contemplant le va-et-vient des vagues.

Debout à leurs côtés, plantée sous le soleil, je me sens triste, si triste. Le vent et le sel ont tout emporté avec eux, les larmes, la joie, le temps.